Citée dès le XIIe siècle dans les textes de l’abbaye de Cluny, l’église Saint-Laurent de Pressiat porte les marques de nombreuses transformations. De sa reconstruction au XIVe siècle, il ne reste que l’abside de plan carré, voutée en berceau brisé, avec une fenêtre haute de forme ogivale.
C’est à la faveur de la chute d’une plaque d’enduit qu’est découverts dans l’abside, en 1986, un décor peint d’une qualité exceptionnelle. Sa restauration s’est achevée en 1995.
Ces peintures murales forment un ensemble cohérent représentant un Jugement Dernier, complété par une Annonciation. Les scènes du Jugement se lisent de haut en bas dans le chœur : le Christ rédempteur, juge suprême, apparaît dans un ciel étoilé, dominant le soleil et la lune. De part et d’autre, la Vierge et saint Jean l’Evangéliste sont à genoux.
En-dessous, au nord, la résurrection des morts est figurée par des personnages soulevant leurs tombeaux et quittant leurs linceuls. Au sud apparaît la pesée des âmes par l’archange Michel qui terrasse le Diable symbolisé par un dragon.
Sur le mur nord du chœur sont figurés les apôtres saint Pierre, saint Paul, saint André, saint Matthieu et saint Thomas, tandis que la représentation des Enfers s’étend sur le mur sud. Elle vise à impressionner les fidèles en ne leur épargnant rien du supplice des damnés, pendus, fouettés ou jetés au feu par un diable crachant des flammes.
Cette œuvre, dont les détails et les couleurs ont été magnifiquement conservés, daterait de la fin du XIVe siècle-début du XVe siècle.
A Pressiat, un saint Antoine est représenté immédiatement avant l’entrée du chœur, côté sud. Le sud était couramment appelé le côté du « vent » tandis que le nord était le côté de la « bise ».
Pendant des siècles, la médecine a été impuissante face aux épidémies et faisait rechercher une protection divine pour les malades. Parmi les innombrables saints intercesseurs – il y en avait pour toutes les maladies – certains étaient généralistes, d’autres spécialistes. Saint Antoine ermite, dit l’Egyptien, fondateur du monachisme oriental, fut choisi comme patron de l’ordre hospitalier des Antonins, parce qu’il avait résisté au feu des tentations.
Il est honoré comme saint guérisseur de l’ergotisme aussi nommé « mal des ardents » ou « feu de saint Antoine ».
L’ergotisme résulte d’un empoisonnement à long terme provoqué par l’ingestion d’alcaloïdes produits par l’ergot du seigle, champignon qui infecte les céréales et contamine les farines, particulièrement en période de disette.
Convulsions, diarrhées, démangeaisons, maux de tête, vomissements, hallucinations figurent parmi les symptômes de l’ergotisme. Dans sa forme gangréneuse, il affecte les extrémités peu vascularisées comme les doigts et les orteils qui se nécrosent et finissent par se détacher.
Fort redoutée au Moyen-Age, cette maladie fit de terribles ravages en Europe. De nombreux chroniqueurs, pour la plupart religieux, ont livré des descriptions concordantes de cette « peste de feu » qui fit des dizaines de milliers de morts et d’estropiés.
Saint Antoine est fréquemment représenté entouré de malades, les « égrotants ». Un pied ou une main détachés par la gangrène posés sur un linge, une béquille en forme de tau, renvoient de manière évidente à l’ergotisme. Il est souvent accompagné d’un cochon et d’une clochette.
A Pressiat, saint Antoine est figuré la main levée en signe de bénédiction. A sa gauche pendent une main et un pied amputés, suspendus en “ex-voto anatomiques”. Cette coutume remontant à l’Antiquité a pour but de remercier de la guérison, même quand elle est au prix d’une infirmité !